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Bénévole à Otema

Jeune sage-femme allemande, Carine a passé ces dernières semaines comme bénévole à Otema - elle y est d'ailleurs encore pour la période du confinement. Nous avons recueilli ses impressions.

"Ici à Lodja, c'est un peu comme dans un village. Certes la ville a environ 80 000 habitants mais il n'y a ni électricité (sauf solaire), quasi pas d'eau courante, ni de rue goudronnée, peu de voitures, juste des vélos et des motos, les gens habitent la plupart dans des maisons en terre avec des toits en tôle ou en paille.

Je suis accueillie chez la famille de Tony, avec sa femme Natacha, leurs 4 fils, et 3 autres ados car c'est la coutume ici que, lorsque quelqu'un a un peu plus de moyens, il accueille des nièces ou neveux ou petits frères ou sœurs chez lui.

La cuisine est dans la cour, on achète chaque jour des produits frais qui sont ensuite préparés sur le feu dehors. Pour la toilette et pour la cuisine, on utilise l'eau de pluie. Je me suis bien habituée au rythme de vie ici, je passe des bons moments avec les enfants et Natacha est vraiment super accueillante et fait toujours en sorte que chacun se sent bien.

Mon quotidien à l'hôpital :

le matin après le petit-déjeuner, on part à l'hôpital en moto (à 8 km) à l'autre bout de la ville. 3 bâtiments sont en fonctionnement, 3 sont en construction en ce moment. Quand on arrive, il y a en général déjà des femmes qui attendent à l'ombre devant l'hôpital pour un suivi de grossesse. Aucune assurance maladie au Congo, donc les patients doivent payer eux-mêmes pour chaque acte médical. Le prix à Otema est peu élevé en comparaison de ce qui se pratique normalement mais souvent les femmes sont si pauvres qu'elles ne peuvent même pas payer quelques dollars.

C'est la raison pour laquelle les femmes viennent pour le suivi de grossesse mais restent chez elles ou dans la forêt ou dans les champs pour accoucher. Tony et ses équipes essaient depuis longtemps de sensibiliser à la nécessité de venir accoucher à l'hôpital

Depuis que je suis là, j'ai eu le bonheur de participer à 7 naissances, dont 3 par césarienne.

Quand j'arrive à l'hôpital, je vais voir celles qui viennent d'accoucher, parfois je participe aussi à la visite que font les médecins à chaque patient. L'hôpital n'a que 25 lits environ pour l'instant, alors on apprend vite à connaître chacun et aussi les familles, qui jouent un grand rôle ici car c'est grâce à elles que le patient a à manger et des vêtements propres, de l'eau pour se laver et des médicaments.

Tout ce que je vis ici est très enrichissant, ne serait-ce que par les opérations qui sont faites (Tony opère comme gynécologue mais aussi pour d'autres cas chirurgicaux). On apprend aussi à être créatif, par exemple on découpe des vieux habits de travail pour emmailloter le nouveau-né.

Quand l'activité est un peu moins intense, j'en profite pour sensibiliser le personnel à l'hygiène et la propreté à l'hôpital, car les moyens sont très limités. En ce moment par exemple, on manque de moyens de désinfection, ce qui est un souci dans ces temps de coronavirus.

Je vois aussi des choses difficiles comme un prématuré qui n'a pas pu être sauvé faute de matériel, des femmes ayant le cancer à qui on n'a aucune chimio à proposer, des patients qui ont développé des infections graves suite à des consultations dans les villages auprès de charlatans qui se disent docteurs.

Ce que je garde le plus en mémoire, ce sont les beaux moments et les heureuses surprises. Par exemple, une maman est venue accoucher, et l'échographie a confirmé ce dont je me doutais : elle attendait des jumeaux! Ce qu'elle ne savait pas, bien-sûr. Après, elle a raconté que depuis que "la blanche" l'avait examinée, bonheur et chance étaient tombés sur sa famille puisqu'elle avait eu 2 enfants d'un coup...

Le soir on rentre à la maison en moto et on passe une soirée paisible en famille. Parfois on fait la cuisine ensemble et je leur ai montré quelques recettes allemandes. Puis vient le moment de chants et de prières en famille et on va ensuite se coucher assez tôt, car le lendemain commencera aussi très tôt...

Mon séjour à Lodja est donc prolongé, sans que je sache pour l'instant jusqu'à quand. Le gouvernement a interdit les vols extérieurs, mais aussi intérieurs. Mais je suis heureuse de continuer à vivre et travailler ici."

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